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Plus que 57 jours de réserves céréalières mondiales Les prix des céréales commencent à grimper
Lester R. Brown pour Earth Policy Institute - 15-06-2006
[traduction Julie Bartoli pour Planète Urgence]Selon les prévisions, il manquera cette année 61 millions de tonnes dans les réserves céréalières mondiales pour satisfaire les besoins de consommation . Ce sera la sixième fois au cours des sept dernières années que la production ne parvient pas à satisfaire la demande. Par conséquent, on estime que les réserves mondiales, en incluant les récoltes de cette année, vont baisser à l’équivalent de 57 jours de consommation. Il s’agirait du stock de sécurité le plus bas depuis 1972, lorsque les réserves tombèrent à 56 jours, entraînant un doublement des prix céréaliers. Les réserves céréalières mondiales, c’est-à-dire la quantité de céréales restante dans les silos avant le début de la récolte suivante, sont la mesure la plus basique de sécurité alimentaire. Dès que les réserves tombent sous la barre des 60 jours de consommation, les prix commencent à grimper. Personne n’a donc été surpris lorsque le Ministère américain de l’Agriculture (USDA) a prévu dans son rapport du 9 juin sur les récoltes mondiales que les prix du blé de cette année augmenteront de 14% par rapport à l’année dernière et ceux du maïs de 22%. Cette projection des prix prend en compte des conditions météorologiques normales pendant la saison de croissance estivale. Si cette année ces conditions sont meilleures, les augmentations de prix pourraient être inférieures aux prévisions, mais si au contraire la récolte est très réduite pour cause de chaleur ou de sécheresse, elles pourraient largement dépasser les augmentations prévues.Les réserves céréalières mondiales étant à leur plus bas niveau depuis 34 ans, il se peut que le monde ait bientôt à faire face à des prix céréaliers et pétroliers élevés en même temps. Pour tous les pays à faible revenu importateurs tant de pétrole que de céréales, ce scénario fait réfléchir. La récolte mondiale de céréales pour 2006, de 1,984 milliards de tonnes selon les estimations de l’USDA dans son rapport du mois de juin sur les récoltes, est en diminution de 24 millions de tonnes par rapport à l’année dernière, c’est-à-dire d’environ 1 %. Elle est en baisse de 3% par rapport au record historique de 2,044 milliards de tonnes produites en 2004.Au cours des 45 dernières années, excepté en 1974, 1988, et 1995 lorsqu’une offre raréfiée et de soudaines augmentations de prix l’ont fait baisser, la consommation céréalière mondiale a augmenté chaque année. La croissance de la demande céréalière mondiale, traditionnellement poussée par la croissance démographique et économique, est dorénavant également poussée par la demande, en rapide augmentation, en carburant automobile à base d’éthanol issu de l’agriculture céréalière. Les récoltes mondiales de céréales sont utilisées de trois façons : environ 60% est consommé dans l’alimentation, 36% est utilisé comme nourriture pour animaux, et 3% comme carburant. Alors que l’utilisation de céréales pour l’alimentation humaine et animale augmente d’environ 1% par an, la part des céréales utilisées pour la production de carburant augmente de plus de 20% par an. Bien qu’un ralentissement du taux d’accroissement démographique mondial soit prévu, on s’attend à ce que la population de la planète augmente de plus de 70 millions par an jusqu’en 2020. Chaque année, les agriculteurs du monde entier doivent essayer de nourrir 70 millions de personnes en plus, que les conditions météo soient favorables ou non. Cette croissance se concentre dans le sous-continent indien et en Afrique sub-saharienne où vit la majorité des personnes souffrant de la faim dans le monde. Lorsque leurs revenus commencent à augmenter, les consommateurs à faible revenu diversifient leur régime alimentaire et passent d’un régime à base de féculents comme le riz, le maïs, le blé et le manioc, à une alimentation plus variée comprenant des produits dont la production nécessite beaucoup de céréales tels que la viande, le lait et les œufs. Dans les pays riches comme les États-Unis et le Canada, la part des céréales consommées indirectement sous la forme de produits issus de l’élevage dépassent largement la quantité de céréales consommée directement comme aliment. L’augmentation des revenus dans le monde permet actuellement à plus de 3 ou 4 milliards de consommateurs à faible revenu de monter d’un cran dans la chaîne alimentaire et de consommer plus de volaille, de porc, de bœuf, de lait, d’œufs et de poisson d’élevage. La production mondiale de viande, qui est passée de 44 millions de tonnes en 1950 à 265 millions de tonnes en 2005, augmente chaque année. Sur cette période de 55 ans, la production par personne a plus que doublé, passant de 17 à 41 kg.L’énorme demande potentielle sur les réserves céréalières mondiales, liée à l’utilisation nouvelle de céréales pour produire du carburant à l’éthanol, se concentre aux États-Unis où l’on prévoit que 55 millions de tonnes de maïs, soit un cinquième des 268 millions de tonnes prévues pour 2006, seront utilisées à cette fin. Cette année, la quantité croissante de maïs utilisée dans la production de carburant automobile rattrapera les exportations américaines de cette céréale, également estimées à 55 millions de tonnes. Pour relativiser, bien que 55 millions de tonnes ne représentent que 16% de la récolte céréalière américaine, cela dépasse l’ensemble des récoltes de céréales du Canada. Les agriculteurs font actuellement face à une croissance record de la demande en céréales alors que l’éventail des technologies disponibles pour augmenter les rendements céréaliers se rétrécit, que les réserves d’eaux souterraines sont en baisse et que des températures en hausse menacent de réduire les récoltes futures. Les niveaux des nappes phréatiques sont actuellement en baisse et les puits s’assèchent dans des pays qui abritent la moitié de la population mondiale, y compris les trois grands producteurs de céréales que sont la Chine, l’Inde et les États-Unis. En Chine, les pénuries d’eau ont fait descendre la récolte de blé de son pic de 123 millions de tonnes en 1997 à moins de 100 millions de tonnes ces dernières années. Le manque d’eau empêche également les agriculteurs indiens d’étendre leurs récoltes de céréales. Dans certaines régions des États-Unis, telles que le nord-ouest du Texas et l’ouest de l’Oklahoma et du Kansas, la baisse de la nappe aquifère d’Ogallala a forcé les agriculteurs à revenir à une agriculture sur terres sèches moins productive. Les agriculteurs du monde entier perdent aussi de l’eau au profit des grandes villes. Aux États-Unis, par exemple, pas un jour ne passe sans une nouvelle vente d’eaux d’irrigation à des villes, petites ou grandes, telles que Los Angeles, San Diego, Las Vegas, et Denver. Dans certains cas, il s’agit de la vente de droits sur les eaux par des agriculteurs individuels à leur ville locale. Dans d’autres, ce sont des districts d’irrigation entiers qui vendent leurs droits, comme dans certaines régions de Californie.La pratique répandue du surpompage des aquifères pour l’irrigation signifie que nous nous nourrissons avec de l’eau qui appartient à la prochaine génération. Alors qu’il est largement entendu que le monde devra à l’avenir faire face à des pénuries d’eau, certains n’ont pas fait le lien avec les futures pénuries alimentaires que cela entraînera probablement. L’augmentation des températures est peut-être la plus grande menace qui pèse sur la sécurité alimentaire. Les écologistes s’accordent maintenant à dire que pour chaque degré Celsius au-dessus de la normale pendant la saison de croissance, il faut s’attendre à un déclin de 10 % dans la production de céréales. Lorsqu’ils prévoient les niveaux de réduction des récoltes en fonction des évènements climatiques, les experts se réfèrent souvent au niveau de récolte potentiel quand le temps revient à la normale. Ils ne se rendent pas compte que le climat de la planète étant maintenant sous l’effet de flux, il n’y a plus de normale à laquelle revenir. De plus en plus au cours des dernières années, des vagues de chaleur fatales aux céréales ont entraîné des pertes de récolte majeures. Pour donner un exemple récent, l’estimation anticipée de la récolte de blé en Inde cette année s’élevait à 73 millions de tonnes. Elle est tombée à 68 millions de tonnes en raison des fortes températures qui ont sévi en janvier et février pendant le stade de croissance crucial des céréales, et ont diminué la récolte. Avec les contraintes inquiétantes qui pèsent sur la croissance de la production céréalière, telles que des pénuries d’eau de plus en plus répandues et des températures en hausse, les agriculteurs rencontrent de plus en plus de difficultés à satisfaire la croissance record de la demande. En conséquence, le marché céréalier mondial pourrait bien devenir un marché à la hausse, un marché sur lequel des prix céréaliers élevés, tout comme des prix pétroliers élevés, feraient partie intégrante du paysage économique.
Lester R. Brown pour Earth Policy Institute - 15-06-2006
[traduction Julie Bartoli pour Planète Urgence]Selon les prévisions, il manquera cette année 61 millions de tonnes dans les réserves céréalières mondiales pour satisfaire les besoins de consommation . Ce sera la sixième fois au cours des sept dernières années que la production ne parvient pas à satisfaire la demande. Par conséquent, on estime que les réserves mondiales, en incluant les récoltes de cette année, vont baisser à l’équivalent de 57 jours de consommation. Il s’agirait du stock de sécurité le plus bas depuis 1972, lorsque les réserves tombèrent à 56 jours, entraînant un doublement des prix céréaliers. Les réserves céréalières mondiales, c’est-à-dire la quantité de céréales restante dans les silos avant le début de la récolte suivante, sont la mesure la plus basique de sécurité alimentaire. Dès que les réserves tombent sous la barre des 60 jours de consommation, les prix commencent à grimper. Personne n’a donc été surpris lorsque le Ministère américain de l’Agriculture (USDA) a prévu dans son rapport du 9 juin sur les récoltes mondiales que les prix du blé de cette année augmenteront de 14% par rapport à l’année dernière et ceux du maïs de 22%. Cette projection des prix prend en compte des conditions météorologiques normales pendant la saison de croissance estivale. Si cette année ces conditions sont meilleures, les augmentations de prix pourraient être inférieures aux prévisions, mais si au contraire la récolte est très réduite pour cause de chaleur ou de sécheresse, elles pourraient largement dépasser les augmentations prévues.Les réserves céréalières mondiales étant à leur plus bas niveau depuis 34 ans, il se peut que le monde ait bientôt à faire face à des prix céréaliers et pétroliers élevés en même temps. Pour tous les pays à faible revenu importateurs tant de pétrole que de céréales, ce scénario fait réfléchir. La récolte mondiale de céréales pour 2006, de 1,984 milliards de tonnes selon les estimations de l’USDA dans son rapport du mois de juin sur les récoltes, est en diminution de 24 millions de tonnes par rapport à l’année dernière, c’est-à-dire d’environ 1 %. Elle est en baisse de 3% par rapport au record historique de 2,044 milliards de tonnes produites en 2004.Au cours des 45 dernières années, excepté en 1974, 1988, et 1995 lorsqu’une offre raréfiée et de soudaines augmentations de prix l’ont fait baisser, la consommation céréalière mondiale a augmenté chaque année. La croissance de la demande céréalière mondiale, traditionnellement poussée par la croissance démographique et économique, est dorénavant également poussée par la demande, en rapide augmentation, en carburant automobile à base d’éthanol issu de l’agriculture céréalière. Les récoltes mondiales de céréales sont utilisées de trois façons : environ 60% est consommé dans l’alimentation, 36% est utilisé comme nourriture pour animaux, et 3% comme carburant. Alors que l’utilisation de céréales pour l’alimentation humaine et animale augmente d’environ 1% par an, la part des céréales utilisées pour la production de carburant augmente de plus de 20% par an. Bien qu’un ralentissement du taux d’accroissement démographique mondial soit prévu, on s’attend à ce que la population de la planète augmente de plus de 70 millions par an jusqu’en 2020. Chaque année, les agriculteurs du monde entier doivent essayer de nourrir 70 millions de personnes en plus, que les conditions météo soient favorables ou non. Cette croissance se concentre dans le sous-continent indien et en Afrique sub-saharienne où vit la majorité des personnes souffrant de la faim dans le monde. Lorsque leurs revenus commencent à augmenter, les consommateurs à faible revenu diversifient leur régime alimentaire et passent d’un régime à base de féculents comme le riz, le maïs, le blé et le manioc, à une alimentation plus variée comprenant des produits dont la production nécessite beaucoup de céréales tels que la viande, le lait et les œufs. Dans les pays riches comme les États-Unis et le Canada, la part des céréales consommées indirectement sous la forme de produits issus de l’élevage dépassent largement la quantité de céréales consommée directement comme aliment. L’augmentation des revenus dans le monde permet actuellement à plus de 3 ou 4 milliards de consommateurs à faible revenu de monter d’un cran dans la chaîne alimentaire et de consommer plus de volaille, de porc, de bœuf, de lait, d’œufs et de poisson d’élevage. La production mondiale de viande, qui est passée de 44 millions de tonnes en 1950 à 265 millions de tonnes en 2005, augmente chaque année. Sur cette période de 55 ans, la production par personne a plus que doublé, passant de 17 à 41 kg.L’énorme demande potentielle sur les réserves céréalières mondiales, liée à l’utilisation nouvelle de céréales pour produire du carburant à l’éthanol, se concentre aux États-Unis où l’on prévoit que 55 millions de tonnes de maïs, soit un cinquième des 268 millions de tonnes prévues pour 2006, seront utilisées à cette fin. Cette année, la quantité croissante de maïs utilisée dans la production de carburant automobile rattrapera les exportations américaines de cette céréale, également estimées à 55 millions de tonnes. Pour relativiser, bien que 55 millions de tonnes ne représentent que 16% de la récolte céréalière américaine, cela dépasse l’ensemble des récoltes de céréales du Canada. Les agriculteurs font actuellement face à une croissance record de la demande en céréales alors que l’éventail des technologies disponibles pour augmenter les rendements céréaliers se rétrécit, que les réserves d’eaux souterraines sont en baisse et que des températures en hausse menacent de réduire les récoltes futures. Les niveaux des nappes phréatiques sont actuellement en baisse et les puits s’assèchent dans des pays qui abritent la moitié de la population mondiale, y compris les trois grands producteurs de céréales que sont la Chine, l’Inde et les États-Unis. En Chine, les pénuries d’eau ont fait descendre la récolte de blé de son pic de 123 millions de tonnes en 1997 à moins de 100 millions de tonnes ces dernières années. Le manque d’eau empêche également les agriculteurs indiens d’étendre leurs récoltes de céréales. Dans certaines régions des États-Unis, telles que le nord-ouest du Texas et l’ouest de l’Oklahoma et du Kansas, la baisse de la nappe aquifère d’Ogallala a forcé les agriculteurs à revenir à une agriculture sur terres sèches moins productive. Les agriculteurs du monde entier perdent aussi de l’eau au profit des grandes villes. Aux États-Unis, par exemple, pas un jour ne passe sans une nouvelle vente d’eaux d’irrigation à des villes, petites ou grandes, telles que Los Angeles, San Diego, Las Vegas, et Denver. Dans certains cas, il s’agit de la vente de droits sur les eaux par des agriculteurs individuels à leur ville locale. Dans d’autres, ce sont des districts d’irrigation entiers qui vendent leurs droits, comme dans certaines régions de Californie.La pratique répandue du surpompage des aquifères pour l’irrigation signifie que nous nous nourrissons avec de l’eau qui appartient à la prochaine génération. Alors qu’il est largement entendu que le monde devra à l’avenir faire face à des pénuries d’eau, certains n’ont pas fait le lien avec les futures pénuries alimentaires que cela entraînera probablement. L’augmentation des températures est peut-être la plus grande menace qui pèse sur la sécurité alimentaire. Les écologistes s’accordent maintenant à dire que pour chaque degré Celsius au-dessus de la normale pendant la saison de croissance, il faut s’attendre à un déclin de 10 % dans la production de céréales. Lorsqu’ils prévoient les niveaux de réduction des récoltes en fonction des évènements climatiques, les experts se réfèrent souvent au niveau de récolte potentiel quand le temps revient à la normale. Ils ne se rendent pas compte que le climat de la planète étant maintenant sous l’effet de flux, il n’y a plus de normale à laquelle revenir. De plus en plus au cours des dernières années, des vagues de chaleur fatales aux céréales ont entraîné des pertes de récolte majeures. Pour donner un exemple récent, l’estimation anticipée de la récolte de blé en Inde cette année s’élevait à 73 millions de tonnes. Elle est tombée à 68 millions de tonnes en raison des fortes températures qui ont sévi en janvier et février pendant le stade de croissance crucial des céréales, et ont diminué la récolte. Avec les contraintes inquiétantes qui pèsent sur la croissance de la production céréalière, telles que des pénuries d’eau de plus en plus répandues et des températures en hausse, les agriculteurs rencontrent de plus en plus de difficultés à satisfaire la croissance record de la demande. En conséquence, le marché céréalier mondial pourrait bien devenir un marché à la hausse, un marché sur lequel des prix céréaliers élevés, tout comme des prix pétroliers élevés, feraient partie intégrante du paysage économique.
4 Comments:
Merci pour cet article qui est très intéressant...
Encore une réponse de plus à ceux qui prônent l'éthanol comme carburant "vert". Quand on sait que le bilan énergétique total de production et le bilan de pollution (en comptant les pesticides et autres procédés de culture) sont plus élevés que pour le pétrole... Mis en parallèle avec la concurrence alimentaire...
Malheureusement, il sera bien sûr bien plus rentable d'en produire ce carburant pour le vendre aux gras poulets que nous sommes que de le vendre aux africains pour les nourrir...
Excellent article...
Merci pour cet article édifiant !
Coucou,
J'espère que tout va bien et que tu as un peu plus la pêche (je crois qu'on lit un peu les mêmes blogs ;-)). Reviens nous vite avec tes jolies créations...
Pensées
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